@ffinités

10 mars 2014
[L’invention de la cage anti-SDF
par un Centre des Impôts parisien.]

Il y a presque un an et demi, Florian – un sans-abri d’origine italo-roumaine qui avait trouvé refuge depuis quelques mois dans un recoin jouxtant le centre des Impôts au 14 de la rue Michel le Comte [Paris III] –, est décédé d’un brutal arrêt cardiaque, dans la nuit du lundi 24 septembre 2112, à l’âge de 36 ans. Ses compagnons d’infortune et quelques riverains qui appréciaient sa façon bohème (mais peu bourgeoise) de jouer des airs balkaniques à la guitare sèche ou d’entonner quelques chansons à boire, ont, dès le lendemain de sa mort, improvisé sur place un autel à sa mémoire, avec des dizaines d’affichettes scotchées au mur et tout un tas de bougies ou de fleurs par terre, sur cette bouche d’aération où il empilait carton et sac de couchage pour y sommeiller en plein air.

Évidemment, ce lieu de recueillement public n’a pas conservé pignon sur rue très longtemps. Routine hygiénique oblige, les employés de la Propreté de Paris ont eu vite fait de disperser un tel vrac de souvenirs au Kärcher. J’y avais déjà consacré un petit reportage sur le vif ici même.

Reste que cet élan de générosité alentour a contribué à faire rapatrier le corps du défunt au pays (des Carpates). Faute de quoi il aurait fini au « carré des indigents » du cimetière de Thiais (Val-de-Marne) où le collectif Les Morts de la rue s’efforce désormais d’organiser des obsèques, maintenant qu’un semblant de sépulture individuelle a remplacé la traditionnelle fosse commune.

Depuis lors, en ce même renfoncement du 12 rue de la rue Michel, plusieurs sans-logis ont élu leur domicile précaire au gré des coups de froid, des records de pluviométrie ou des pics de canicule. C’était encore le cas il y a mois comme j’ai pu le vérifier en filant une clope au résident du moment. D’où ma surprise en apercevant la semaine dernière que de hautes grilles avaient été érigées pour condamner cette zone de repos précaire. Qu’on en juge de visu.

Il s’agit bien d’une cage anti-SDF, scellée profond dans le trottoir et clôturant cet angle mort, afin d’en interdire l’accès aux amateurs de « mendicité agressive », selon l’expression hélas consacrée. On connaissait les divers stratagèmes du mobilier urbain pour empêcher la station assis ou couchée des « parasites sociaux »…

Mais là, un nouveau pas est franchi avec ce genre d’innovation zootechnique : grillager une portion de la voirie pour enfermer les sans-logis dehors ! Privatiser deux ou trois mètres cube de l’espace public pour éviter que s’y installe un « profiteur de l’assistanat ». Construire en 3D un sas d’exclusion exemplaire au cœur du Marais dévolu au tourisme de masse. Et répondre par avance à toute objection en ces matières ditres humanitaires : plutôt rien qu’un moins-que-rien.

Difficile d’effacer les traces de la barbarie à l’œuvre derrière ces barreaux. Une main inconnue a même tenté de recoller le vestige d’une rose in situ.

Autre détail troublant, sur le cadenas maintenant verrouillée cette exposition édifiante, un couple d’amoureux y a déjà inscrit les initiale de leur idylle, sans penser à mal.

Quant au responsable de cette mise sous séquestre de ce bout de trottoir, il suffit d’interroger un commerçant limitrophe pour obtenir la réponse: « C’est le Centre des Impôt qui s’est plaint de trouble de voisinage…»

En fait le Centre des Finances Publiques, comme il est indiqué sur une affichette depuis la fin des travaux.

Quant au grossiste en bijoux fantaisie et autres tours Effeil miniatures, sur le trottoir d’en face, ça ne lui a pas porté chance. Il a dû faire faillite peu après la mort de Florian, à en juger par sa vitrine passée au badigeon blanc et aux lettres manquantes de sa raison sociale.

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26 février 2014
[Images arrêtées & idées fixes
Transhumances vacancières.]

Du levant au couchant, et réciproquement.

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12 février 2014
[Images arrêtées & idées fixes
Fleurs de bitume brûlant
l’artifice de tous leurs feux.]

Rouler au plus près de ses illusions d’optique.

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3 février 2014
[Abécédaire / cinquième série —
Vingt-six façons de visiter pensebete.archyves.net
Chemins de traverse & issues de secours.]

A comme Adages Adhésifs

[Stickers – Art du bref – Parasites verbaux
Bribes de sens – Dissémination urbaine ]

Rendez-vous ici & .

B comme Balance ou Bélier

[Horoscope – Oracles – Signes zodiacaux
Conseils devinatoires – Prophéties & Cie ]

Rendez-vous ici même.

C comme Crachés (portraits)

[Singulier pluriel – Arte povera – Ébauche
Existences potentielles – Système d’échos
]

Rendez-vous ici & .

D comme Détournement

[Contre-emploi publicitaire – Palette graphique
Lapsus visuels – pseudo Logo – Satiété du Pestacle
]

Rendez-vous ici ou ou ailleurs.

E comme Exhumer (prière d’)

[Sainte-Rita – Causes perdues – place Blanche
Babil bistrotier – Homme de ménage – Blackout
]

Rendez-vous ici même.

F comme Facho (newlook)

[Banalisation rampante – Propagande décomplexée
Bébête & immonde – Beaufitude & peste brune
]

Rendez-vous ici même.

G comme les Gauchers (sur scène)

[Contre-légendes urbaines – Oralité réinventée
Récits collectifs – Déjouer ses propres règles
]

Rendez-vous ici même.

H comme Homophobie (stalinienne)

[Van der Lubbe – Effet pervers du complotisme
Portrait-robot du « pédéraste petit-bourgeois »
]

Rendez-vous ici même.

I comme Irrésolutions permanentes

[Fausses-bonnes intentions – Velléités – Infinitif
Procrastiner – Serment d’hypocrite – Juste fais-le
]

Rendez-vous ici même.

J comme Jamais contentes

[Mouvement autonome des femmes – 1979
Mère célibataire – Salaire social – MLF ?
]

Rendez-vous ici & .

K comme Kärcher (censure au)

[Ravaler la façade – Journal mural
rue de Chantilly – Honte sociale
]

Rendez-vous ici même.

L comme Lapsus

[Singes savants – Hors droit d’auteur – Oups
Mot d’esprit – Acte poétique & acte manqué
]

Rendez-vous ici même.

M comme Même (en revenir au)

[Arnaud Lesage – Coïncidences rétrospectives
Minimalisme incendiaire – Renaître de ses cendres
]

Rendez-vous ici même.

N comme Noir (le sang)

[Louis Guilloux & L.-F. Céline
Une guerre dite pour une autre
]

Rendez-vous ici même.

O comme fiascO (photo-)

[Déclic à retardement – Image empêchée
Non-événement – Perdu de vue – Hors cadre
]

Rendez-vous ici ou ou ailleurs.

P comme Paraboles

[Algérie – Rumeurs à la chaîne – Toit terrasse
Zapper sans visa – Temps mort – Couvre-feu
]

Rendez-vous ici même.

Q comme Qui Que Quoi Qu’est-ce ?

[Pessimisme radieux – Erreur system
Tous azimuts – Patchwork in progress
]

Rendez-vous ici même.

R comme Réal (Grisélidis)

[L’année 1954 – Suzi Pilet – Lausanne & Genève
Maurice Chappaz – Portraits de femmes bohèmes
]

Rendez-vous ici même.

S comme Spectres (la compagnie des)

[Lydie Salvayre – Huis clos & huissier
Divan confisqué – Auto-enfermement
]

Rendez-vous ici même.

T comme Tractatus politicus

[Tracts – Papillon – Flyer – Non-encarté
Seventie’s not dead – Électrons libres
]

Rendez-vous ici même.

U comme Urbanité (& incivilité)

[Broken window theory – Tolérance zéro
Répression préventive – Politesse d’Ancien Régime
]

Rendez-vous ici même.

V comme Vœux (à Volonté)

[Contrefaçons – Bonne année
Carte postale – Fête & défaite
]

Rendez-vous ici même.

W comme the Wire (& street voice)

[Baltimore – Homless & junkies – Série TV
Envers du décor – Subjectivité policière
]

Rendez-vous ici même.

X comme seXe tarifé

[Prostitution & pénalisation – Rendre invisible
Credo abolitionniste – Émancipation collective
]

Rendez-vous ici même.

Y comme métonYmie anatomique

[Mannequinat – Lèche-vitrine – Va-nu-pieds
Pièces détachées – Tronc commun – Tête en l’air
]

Rendez-vous ici ou ou ailleurs.

Z comme Zoom animalier & Zones d’ombre

[Petites différences – Serial posters – Déjà vu
Échantillonnage – Bribes de réalité – Photos
]

Rendez-vous ici ou ou ailleurs.

Retour au quatrième abécédaire
[mars 2013], c’est par là.

[Affiche – Binômes (icônes) – Céline (& bad Cie) – Debord (guy) – Esprit satirique (misère de l’) – Fiasco (photo-) – Gauchers (les) – Hors sol – Invention de la giraffe – Jésus (alias) – Karma – Lecture en diagonale – Mimétique (art) – Nostalgisme – FrOnt hOmOsexuel d’action révOlutiOnnaire – Perec (georges) – arnaQue – Rien (plutôt que) – Santé (prison de la) – Tag (Tag-au) – Urbaines (légendes) – Vroum vroum – Wallet (bernard) – X (mort sous) – diapositYves – Zazie ]

Retour au troisième abécédaire
[octobre 2012], c’est par là.

[Aveugle (lycéens) – Bref (art du) – Contradicton – Dactylographe (singe) – Érable (printemps) – Fake & plagiat – Grisélidis Réal – ortHograpHe (réforme de l’) – vertIcales (éditions) – Journal mural – Kultur & Kapital – Liabeuf – Muraux (arts)– carabiNier (les)– Œil (histoire de l’) – Perdu (avis de recherche) – Quatrième de couverture – Rue du Renard (sise 15) – Servet (benjamin) – Tracts (biblio-) – Underground (seventies USA) –Variétés – Work (or not to) – eXhumer (prière d’) – triptYque & diptYque – tarZan (moi pas) ]

Retour au deuxième abécédaire
[mai 2012], c’est par ici.

[Après-demain – Baltard (pavillons) – Cochon (Georges) – Démission (lettres de) – Elvis (de Médicis) – Façadisme –  Gondole (tête de) – Harlan (Thomas) – Intermittents de l’emploi – Job (bon ou mauvais) – fucK (what the) – Logo – Miss France vue de dos – Nuit (voyage au bout de la) – Odéon (occupation de l’) – Pitié dangereuse – PolitiQue & poétiQue – seRial posteR – Slogans – Trenet (Didier) – Usuel & Ustensile – Van (Jules) – Water-closet – X (fils de) – hYpothèse – paparaZZi.]

Retour au premier abécédaire
[janvier 2012], c’est par ici.

[Arslan (Yüksel) – Badges – Crise (vive la) – Dico (pseudo-) – Eléphant (défense d’) –
Faurisson (Robert) – Graffiti – Hennig (Jean-Luc) – Inconduite (leçons d’) –
Jeunesse (Front de Libération) – Kibaltchitch (Alias Victor Serge) – Losfeld (Eric) –
Marinus van der Lubbe – aNormaux (impossibilité d’être) – Oublier (de ne pas) –
Pouvoir Point – hocQenghem (Guy) – Roms et Recyclage – Son (mur du) –
Téléphonique (cabine) – Umour (noir & blanc) – Voïna –
Witold (Gombrowicz) – seXisme ordinaire –
bYographie (auto-) – Zyeuter.]

Pour être tenu au courant du prochain Abécédaire,
il suffit de s’inscrire en haut à droite du
Pense-bête.

À une prochaine…


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27 janvier 2014
[Le Street Art dans tous ses états
Censure municipale et privatisation arty,
sur le mur du 15 rue du renard (suite).]

Depuis juin 2010, j’ai choisi un mur parmi tant d’autres – le renfoncement d’une sortie de garage, au 15 rue du Renard, à mi-chemin du centre Beaubourg et de la place de l’Hôtel de Ville –, où photographier sous le même angle les métamorphoses d’un angle mort urbain investi par des adeptes du graffiti, du pochoir ou de l’affichisme éphémères. On en avait déjà rendu compte dans un article,de septembre 2013, mettant en regard ce principe d’exposition sauvage et les espaces labellisés du Street Art officiel, comme ces quelques mètres carrés que l’association M.U.R. s’est fait concéder à l’angle de la rue Oberkampf et de la rue Saint-Maur, petit îlot branché pour happy few de la mouvance – un tel Graffitik Park en liberté très surveillée servant aux autorités municipales à justifier partout ailleurs l’éradication des autres expressions murales, renvoyées dans le même sac d’un vandalisme dégradant.
Revenons à notre spot non-autorisé, au 15 de la rue du Renard. Depuis l’automne 2013, une quarantaine de photos (à voir plus loin) témoigne des motifs qui n’ont cessé de s’y déployer, côtoyer, parasiter dans une succession irrégulière, mais moins chaotique qu’il n’y paraît, comme autorégulé selon un processus immuable. Sous la pression des riverains outragés, les nettoyeurs de la mairie de Paris ont en effet décollé, effacé puis repeint douze fois en une seule année ce même mur. Et c’est très paradoxalement, ce rituel hygiéniste – tel un running gag sisyphéen – qui permet le renouvellement perpétuel de ce lieu d’exposition illégal. Chaque passage au kärcher, chaque remise à nu, chaque ripolinage au gris redonnant ainsi aux activistes du papier collé ou de la bombe aérosol une surface «propre» à leur appropriation, un aplat idéal qui leur sert de toile de fond.… et ainsi de suite. Éternel ressort dialectique entre censure monochrome et inventivité polymorphe, selon les secrètes superpositions d’un palimpseste à ciel ouvert.
On remarquera cependant que cette modeste Zone de créativité temporaire connaît d’autres écueils, abus ou limites. Entre autres pierres d’achoppement, la privatisation de cette friche murale pour une seule et même artiste – Konny Steding – dont les sérigraphies néo-punk, aux effigies rebelles convenues,  laissent peu de place aux tags in progress barbouillés par d’autres petites mains anonymes, occupent le terrain sans trêve ni répit, bref monopolisent ces quelques mètres carrés pour en faire la vitrine officieuse de ses vernissages d’artiste. Quand le hors champ des marges se fait la nique, en singeant les pulsions dominantes de l’arrivisme autopromotionnel, La preuve par l’image, en photo-feuilleton, ci-dessous.



En guise d’épilogue provisoire, ce nouveau collage in situ, où se dévisage quelques chose de nous-mêmes. Tout un programme emblématique.

Avant qu’on les effaceurs d’encre murales ne viennent remettre les compteurs à zéro.

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21 janvier 2013
[Images arrêtées & idées fixes
Lettre ouverte sur l’odeur du temps présent.

La (F)rance mise à nu par ses identitaires même.

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15 janvier 2014
[Le Street Art dans tous ses états
Les graffitis de juin 68 à nos jours…
rapport d’étape d’une collecte en cours.]

Les inscriptions murales du printemps 68 font désormais partie d’un folklore patrimonial sans lendemain. Et pourtant, des seventies à l’immédiat aujourd’hui, les graffitis n’ont pas cessé de proliférer, se renouveler, passer de main en main, n’en déplaise à ceux qui voudraient traiter les tags au Kärcher sous prétexte de vandalisme autistique. Alors, pour donner à voir la permanence clandestine de ces expressions sauvages depuis quatre décennies, on a fureté à tous les coins de rue, traqué les bribes de phrases à la craie, au marqueur ou à la bombe dans des livres, des revues, des archives photo et, plus récemment, parmi les sites consacrés au « Street art », malgré l’indifférence manifestée par les pros du Graff pour la créativité textuelle qui continue d’exister à rebours du carriérisme narcissique de ce milieu, obnubilé par le colorisme XXL à l’aérosol et la monomanie du blaze territorial. N’empêche, ici ou là, les murs ne cessent de prendre la parole, de produire du sens, entre mots de passe urbains et petites annonces anonymes, il suffit de prêter attention par exemple au renouveau du pochoir ironique & subversif sur les bords de la méditerranée ou en Amérique Latine, en passant par les petits mots doux & rageurs qui font des petits un peu partout : à Niort ou Melbourne, Strasbourg ou Brooklyn, Marseille ou Montréal, Paris ou Saint-Ouen, même si l’efficacité implacable de la vidéosurveillance et des équipes de nettoyage privées ou municipales gagne chaque jour du terrain.
D’où cette compilation numérique, comme un chantier à ciel ouvert, qui voudrait recenser ces bribes d’écritures malhabiles, potaches, dyslexiques, absconses, lapidaires, lacunaires, puériles ou sidérantes, glanés depuis quelques années sur des sites web ou, pour les plus contemporaines, avec mon appareil photo toujours prêt à saisir au vol d’inédites inscriptions, sans oublier l’aide précieuse de quelques comparses amateurs qui me font partager leurs découvertes.
Entamé il y a 3 ans, ce recueil provisoire compte déjà plus de 3700 graffitis distincts – transcrits tels quels, datés et localisés autant que possible. Nul souci d’exhaustivité dans cette collecte, puisque la tâche est par nature infinie, juste le work in progress d’un recensement partiel & partial, qui un de ces jours deviendra peut-être un gros bouquin, mais dont on peut déjà feuilleter ou télécharger la somme de plus de 300 pages en format pdf ici même…

Et dans la foulée, pour donner envie à quelques transcripteurs dilettantes de me prêter main-forte, pour enrichir la liste de leurs trouvailles in situ ou pour en inventer d’autres à taguer par ses propres moyens, on lira ci-dessous quelques messages & aphorismes plus ou moins récents extraits de ma collecte, piochés parmi tant d’autres.

transport payant =
vol sur le salaire

[Paris, station de métro après sabotage des composteurs, juin 78 ]

jesus est mort!
t’inquiètes pas!
il est aussi ressuscité!

[Genève, rue de Berne, 00 ]

i am this poem

[Australie, Perth, 14 mars 06 ]

to turn right
turn left twice

[Irlande, Dublin, au pochoir, 18 février 06 ]

suis le lapin blanc

[Paris XIV, métro Duroc, sur miroir, 14 février 07 ]

nous nous en allerons

[Paris X, quai de Valmy, 9 juillet 10 ]

bored ? fatigued ? depressed
why not try revolution

[Grèce, Athènes, quartier Exarchia, automne 10 ]

drink… drank… drunk…

[Berlin, au pochoir, «DotDotDot», mi-octobre 10 ]

ça fatigue
d’être jeune

[Paris XVIII, 17 février 11 ]

le présent…
c’est maintenant

[Metz, 11 mars 11 ]

n’oubliez pas
la mémoire
est courte

[Paris xiii, rue Geoffroy, 4 décembre 11 ]

les nations
sont des
hallucinations!

[Suisse, Lausanne, route Aloys-Fauquez, 5 avril 12 ]

tant va le prolo à l’usine
qu’à la fin il se lasse!

[Montpellier, 1er mai 12 ]

en moyenne l’amitié dure entre 5 et 7 ans

[Marseille, rue Frédéric Chevillon, mi-août 12 ]

suffit-il?

[Canada, Québec, mi septembre 12 ]

la poesia no necesita
adeptos, sino amantes

[Argentine, Tucuman, «Accion Poetica», octobre 12 ]

nul si recouvert

[Sète, au pochoir, 17 janvier 13 ]

ici vie
un peuple
de boue

[Notre-Dame-des-Landes, quelque part
dans la ZAD, février 13 ]

dur comme faire

[Paris V, à la craie, 23 février 13 ]

même l’inerte est mis en cage

[Rennes, chemin de Halage, 7 juin 13 ]

barbouiller
pour l’éternité

[Canada, Montréal, Hochelaga-Maisonneuve, 3 juillet12 ]

dieu
chèques ou
espèces

[Paris XVIII, 10 juillet 13 ]

la paresse ne nous est pas ennemie
free party

[Paris XI, rue Proudhon, 13 juillet 13 ]

no more pain(t)

[Entre Rennes et Saint-Malo, voie rapide, mi-juillet 13 ]

soyez réel
demandez
le virtuel

[Lyon, Croix-Rousse, au pochoir, 16 juillet 13 ]

que le mouton soit chèvre

[Marseille, au pochoir, 31 juillet 13 ]

i dream awake

[Montreuil, rue Léon Loiseau, août 13 ]

vivre en mar«geu»
pour pas crever
au milieu

[Lyon, Croix-Rousse, 8 août 13 ]

stop taking my book
so litterally – god

[États-Unis, Brooklyn, mi-août 13 ]

lorem ipsum

[Entre Nantes et Rennes, pont sur N137, mi-août 13 ]

dieu est un singe
et je suis sa cage

[Suisse, Lausanne, l’Hermitage,
au pochoir, 1er septembre 13 ]

# oubli

[Paris XI, rue du Faubourg du Temple,
à la craie, 18 septembre 13 ]

meuble tes pensées

[Saint-Ouen, Marché aux puces, 23 septembre 13 ]

ensemble
bâtissons un monde
sans brocoli

[Saint-Étienne, 26 septembre 13 ]

j’prefaire habité
un quartier sensible
qu’un quartier insensible

[Paris XVIII, rue Marcadet, «Fatou», octobre 13 ]

big google
is indexing you

[Metz, au pochoir, 4 novembre 13 ]

les automnes ont
comme des parfums

[Strasbourg, rue du Vieil Hôpital, 23 novembre 13 ]

entretuez-vous

[Rouen, 24 novembre 13 ]

tout ce que tu ne peux donner…
te possède

[Lyon, Croix-Rousse, 8 décembre 13 ]

ne pas prendre les messies
pour des lanternes

[Montreuil, rue Marcel Sembat, «LapsOups», 2 janvier 14]

Outre cette transcription systématique & hasardeuse d’écritures murales, on trouvera sur le site deux diaporamas sur le même sujet, l’un consacré aux bombages des années 70 et l’autre s’enrichissant au jour le jour de graffitis plus récents, glanées sur le Net ou pris sur le vif, sur cette page-là.

Et pour conclure en beauté, une quarantaine de traces textuelles in situ, soit glanées sur le Net, soit photographiés par mes soins.

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13 janvier 2014
[Images arrêtées & idées fixes
Tout doit disparaître.]

Espaces culturels en jachère.

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8 janvier 2014
[En roulant en écrivant

l’aide-mémoire du coursier.]


Il y a quelques semaines, non loin de la Porte Saint-Denis, allant pour renfourcher mon scooter, après une halte au tabac du coin, j’avise l’engin garé à mes côtés : un vespa au grand pare-brise blanc couvert d’inscriptions minuscules.


Aucun doute, il ne s’agit pas de la fantaisie typographique d’une déco d’origine, ni de quelques graffitis salaces ajoutés à la sauvette, mais d’une liste minutieuse, obsessionnelle, systématique, proliférant partout, comblant le moindre espace libre sur cette demi-bulle en fibre de verre. Une machinerie d’art brut ? Les branches d’un arbre généalogique ? Une cosmogonie manuscrite de stars déchues ?

Pas le temps de m’interroger de plus près. Le propriétaire du véhicule est de retour. Casque à visière relevée sur la tête, et enveloppe de papier kraft à la main. Il me voit intrigué. La conversation s’amorce. Lui, coursier depuis plus de vingt ans, Paris intra muros et banlieues limitrophes. Alors, ces gribouillis ? Juste ses mots d’auteur, une façon de customiser sa monture. Il a noté au fur et à mesure les noms des rues qui lui plaisaient. Pas les patronymes de saints, militaires, présidents, ministres, écrivains et autres sommités hexagonales qui encombrent le pavé parisien, mais plutôt des noms communs, du commun des mortels trépassés depuis belle lurette, leurs appellations devenues énigmatiques, leurs corps de métiers abolis, leurs paysages rayés de la carte, leurs tournures fabulatoires, et toutes les scories verbales qui vont avec, tombées d’un ciel obscurci par les ans, bref ces lieux-dits mais si bizarrement dits qu’on n’en finit pas de se demander d’où ça leur vient un tel sobriquet d’emprunt : passage du cheval blanc, rue de l’épée de bois, rue de la grosse bouteille, rue vide-bourse, rue du chat qui pèche, rue du pont aux choux, rue des cinq diamants, rue de la poule rouge…

J’en reste interdit sur place, bêtement admiratif face à ce pense-bête urbain. Nul besoin de GPS pour qui sait aussi voyager dans le temps. Je lui demande au débotté la permission de prendre quelques photos. Quatre ou cinq clichés, histoire de faire le tour du chef-d’œuvre à claire-voie. Une stèle ambulatoire, qui l’air de rien, me rappelle que je suis né il y a cinquante ans à deux pas des rues de la petite et grande truanderie. En espérant qu’il ne vienne pas aux édiles municipaux l’idée de les débaptiser au profit d’une célébrité provisoire ou d’un fameux notable pour service rendu à la Nation.

post-scriptum :
Sans tomber dans une nostalgie mal placée, on ajoutera ici quelques cas de figure faisant la part belle aux rues arborant, de longue date ou par accident, des noms a priori im-propres.

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1er janvier 2014
[Nouvelle année… vœux à volonté
Cinq (contre-)façons de se la souhaiter.]


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