4 septembre 2015
[Le Street Art dans tous ses états
Graffiti des 46 dernières années…
extraits d’une collecte illimitée.]

Les graffiti du printemps 68 ont beau avoir été réifiés en pur folklore patrimonial, le phénomène n’a cessé de proliférer – des seventies à l’immédiat aujourd’hui –, n’en déplaise à ceux qui préfèrent traiter les tags au Kärcher sous prétexte de vandalisme barbaresque. Alors, pour donner à voir la permanence clandestine de ces inscriptions murales sur quatre décennies et demi, on a traqué des bouts de phrases à la craie, au marqueur ou à la bombe in situ dans la rue, mais aussi parmi livres, revues et les rares sites consacrés au Street art prenant en compte la dimension textuelle, malgré l’indifférence manifestée par les pros du Graff pour l’expression textuelle, à rebours du carriérisme de ces milieux arty, obnubilés par le technicolorisme XXL à l’aérosol et la fixette narcissique
du blaze territorial.

Et pourtant, les murs ne cessent de reprendre la parole, de produire du sens, entre mots de passe urbains et petites annonces anonymes. Il suffit de prêter attention aux aphorismes doux & rageurs qui font des petits un peu partout : à Quimper ou Prague, Marseille ou Oakland, Lyon ou Montréal, Saint-Ouen ou Montreuil, même si l’implacable efficacité de la vidéosurveillance et des équipes de nettoyage (privées & municipales) gagne chaque jour du terrain.
D’où l’idée d’une compilation, comme un chantier à ciel ouvert, qui voudrait recenser ces bribes d’écritures malhabiles, potaches, dyslexiques, absconses, lapidaires, lacunaires, triviales ou sidérantes, glanées depuis quelques années sur des sites web ou, pour les plus contemporaines, via mon appareil photo à l’affût d’inédites inscriptions, sans oublier l’aide précieuse de comparses amateurs – dont les irascibles dilettantes du Tumblr Graffitivre – qui me font partager leurs découvertes.

Entamé il y a 3 ans, ce recueil provisoire compte déjà près de 4800 graffitis distincts – transcrits tels quels, datés et localisés aussi précisément que possible. Nul souci d’exhaustivité dans cette collecte, puisque la tâche est par nature illimitée, juste le dream in progress d’un recensement partiel & partial, qui un de ces jours deviendra peut-être un gros bouquin, mais dont on peut déjà feuilleter ou télécharger la somme de 425 pages en format pdf ici même… et son diaporama juste là.

Et dans la foulée, pour donner envie à quelques transcripteurs occasionnels de me prêter main-forte, pour enrichir la liste de leurs trouvailles in situ ou pour en inventer d’autres à taguer par ses propres moyens, on lira ci-dessous un lot de messages extraits des nouveautés de ma collecte, piochés parmi tant d’autres.

QUI A COUPE NOS NERFS ?

[Aurillac, 23 août 15]

QUAND DEVIENDRONS
-NOUS CE QUE NOUS
SOMMES ?

[Thorigné-Fouillard, domaine de Tizé, mi-juin 15]

THINGS I HATE :
1. VANDALISM
2. IRONY
3. LISTS

[Rennes, Fac Rennes 2, toilettes BU, 22 mai 15]

DUR DUR
DE PARTIR
TRAVAILLER

[Quimper, rue Saint-Nicolas, mai 15]

MANGEZ
5 ENFANTS
PAR JOUR

Marseille, La Friche, 21 avril 15]

YA WENT TO HIGH SCHOOL
… I WENT TO SCHOOL HIGH

[Montreuil, rue Girard, 12 avril 15]

JE TE RESPIRE

[Niort, 6 avril 15]

SECURITY IS A DANGER

[Brésil, Rio de Janeiro, «Sean Hart»

place des Expedicionario, avril 15]

NO PAIN NO FROMAGE

[Marseille, 23 mars 15]

NI SANG SUR
NI CENSURE

[Paris XI, rue de Malte, 10 janvier 15]

VIVALDI
PLAGIEUR CONFIRMÉ

[Brest, 5 janvier 15]

CRÈVE ADULTE

[Paris XVIII, rue de l’abreuvoir, 1er janvier 15]

JE DÉGRADE PAS
J’AJOUTE DE LA MATIÈRE

[Paris XI, rue Pelée, 22 décembre 14

N’EXAGERONS TOUT !

[Lyon, 7 décembre 14]

NI GAUCHE
NI DROITE
NITROGLYCÉRINE

[Lyon, près place Gabriel Peri, 29 novembre 14]

SEUL ON PEUT RIEN DEVANT CAT WOMAN

[Paris IV, rue Charlemagne, 28 novembre 14]

HORS ZONE TON OMBRE N’EST PLUS

[Paris XX, rue Ramponeau, 17 novembre 14]

PROCRASTINATOR

[Toulouse, 5 novembre 14]

DES FAUX PAPIERS POUR TOUS

[Sète, 3 novembre 14]

MORT AUX SAGES
PLACE AUX SINGES

Albi, place Jean Jaurès, 29 octobre 14]

GUÈRE
SOCIALE

[Lyon, Croix-Rousse, 9 octobre 14]

LE JOUR DE GLOIRE
NE VIENDRA PAS

[La Roche-sur-Yon, rue G. Clemenceau, 11 septembre 14]

LE MOUTON EST UN PERROQUET…
SINON IL FERME SA GUEULE

[Paris XX, bd de Charonne, 7 septembre 14]

BIO
OU
CHIMIO

[Bruxelles, au pochoir, 2 septembre 14]

RECHERCHE
SUR LES
LÈVRES

[Paris XX, rue J.-B. Dumay, 1er septembre 14]

JE REVIENS [DE LOIN]

[Paris XX, rue Auger, 27 août 14]

BAISE LES PSY

[Lyon 7, av. Jean Jaurès, à la craie, 25 août 14]

LE FIL DU RASOIR EST BIEN ETROIT

[Lyon 5, pont de la Feuillée, 22 août 14]

MORT DE FIN

[Paris VI, Cours du Commerce St-André, 2 juillet 14]

JE
PENSÉ
QUE
J’ÉTAIT
QUELQU’UN

[Marseille, 10 avril 14]

LE TRAIN DE TES
INSULTES N’A PAS
DE WAGON-BAR

[Limoges, janvier 14]

PRÉFÉRENCE
INTERNATIONALE

[Sables d’Olonne, au pochoir, 9 mars 12]

DÈS LE DEBUT
IL N’Y AVAIT PAS
DE COMMENCEMENT

[Bruxelles, rue des Chartreux, 19 avril 10]

LOOK
BUSY
JESUS
IS COMING

[UK, Île de Wight, au pochoir, 09]

AUTO
PSY

SI TOI

HYÈNE

[Paris X, au pochoir, 11 avril 07]

LES CORBEAUX VOLERONT SUR LE DOS
POUR NE PLUS VOIR LA MISERE DES TRAVAILLEURS

[Longwy, 94]

NON A L’INTIMATION
POLICIÈRE

[Bron, septembre 82]

NO FUTURE

[Coutances, hall du Lycée agricole, 20 mai 78]

EAT THE RICH

[UK, Londres, Notting Hill, Golborne bridge, 77]

VIVE LA DICTARIAT DU PROLETATURE

[Rennes, fac Villejean, Bâtiment 2, 72-73]

DADA IS
EVERYWHERE

[Londres, Kentish Town, 71]

Et pour conclure en beauté, une petite trentaine d’interventions textuelles photographiées, à deux exception près, par mes soins.


Pour faire circuler ce texte, le lien est ici même