30 mars 2010
[Portraits crachés — Mâle à propos.]

Au Venezuela, il y a un sacré bail, les Amérindiens ayant survécus aux croisades coloniales d’Amazonie comptaient quatre femmes pour un homme. C’est un très corpulent inconnu qui l’affirme, à l’autre bout de la tablée nocturne, avant de vider son verre d’un trait d’esprit douteux… enfin en moyenne, mais y’en a des pas mal. Ce qui ne fut pas sans conséquences, encore sensible aujourd’hui, enchaîne-t-il doctement en commandant la bouteille suivante. Cet ancestral déséquilibre démographique a laissé des traces profondes, insiste-t-il en resservant les convives d’autorité. D’où cette drôle de coutume qui perdure dans les mœurs du cru : une polygamie sans légitimation religieuse – et hop, il conclut sa phrase cul sec. Chez ces mâles dominants, aucun effort à fournir, ni régime alimentaire, pour plaire au sexe opposé, juste bouffer et picoler tout son saoul.
« Garçon, la même chose ! »
Un peuple d’obèses sans honte, au-delà du bien et du mâle, bien dans sa peau quoi ! triomphe-t-il en trinquant avec son voisin quelque peu réticent. Là-bas, tous avachis les mecs, vu qu’ils ont que l’embarras du choix pour se faire materner, engraisser, dorloter… et plus si affinités. C’est l’occasion ou jamais de porter haut un nouveau toast, dans l’air saturé d’utopie virile. Y’a qu’à lever le petit doigt, et ça emballe sec… d’ailleurs cul sec derechef. Trois petits point de suspension, on s’y croirait presque, ponctué d’un rire gras face à l’auditoire condamné au silence. Et voilà, notre conquistador sexuel a achevé son récit de voyage. Toute langue déliée, il en a plein la bouche de sa surpopulation féminine.
Je me défile au comptoir, et propose à la seule femme ici présente, la serveuse, un arrangement à l’amiable : l’addition s’il vous plaît.

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