23 avril 2019
Images arrêtées & idées fixes
Photomanies, deuxième série [1].

Il y a quatre ans, Fabienne Pavia publiait au Bec en l’air un recueil des mes lubies photographiques selon un principe élémentaire : mettre en regard, selon des affinités perceptives, deux images, en laissant jouer ces correspondances sans commentaire parasite. Pour moi, ce fut un exercice d’ascèse verbale, des matinées entières passées à expérimenter des accouplements visuels, paire par paire conçues d’évidence, parfois déconstruites sur le tard puis réagencées selon d’autres hasards objectifs, et ainsi de suite, jusqu’à épuisement des combinaisons possibles. Pour l’essentiel, dans cette marqueterie binaire, il s’agissait de me fier à la libre association poétique des idées ou des assonances, mais en faisant cette fois l’économie de tous les signes d’ordre langagier.
D’où l’objectif de ma méthode : s’impliciter. Même si ce mot, d’après les dictionnaires, n’a pas l’air d’exister.
Une fois le bouquin sorti en librairie, j’ai aimé voir les gens le feuilleter à rebours ou par n’importe quel bout, faisant halte sur telle double-page et lui prêtant une attention particulière, accompagnée parfois d’un sourire complice. Ce qui m’a amplement suffi, puisqu’il ne s’agissait pas de me proclamer expert en cadrage ou en mise au point, mais de partager avec des inconnus quelques visions de monde coïncidentes. Ensuite, j’ai cru perdre la vue, ou pour le dire moins abruptement, j’ai perdu l’envie de chasser les papillons accidentels de la réalité et d’en épingler les cadavres exquis, bref de prendre quoi que ce soit en photo. J’ai peu à peu délaissé l’habitude d’avoir toujours dans la poche un petit appareil numérique, et retrouvé la liberté de laisser filer le réel, sans vouloir aussitôt en capter le mystère au vol. Sauf que qu’une autre lubie, celle des graffiti, m’obligeait encore à garder des traces, via mon téléphone portable cette fois. Et dans les marges de cette traque épisodique, entre deux inscriptions murales immortalisées, m’est revenu le goût du déclic urbain. Entre-temps, je m’étais essayé à un autre format, le carré parfait, pour trancher l’éternel dilemme du smartphone, saisir la scène en largeur ou en hauteur. Et voilà que cette variante géométrique – une fenêtre sur le monde aux quatre côtés égaux –, a changé la donne depuis quelques mois et renouvelé le désir d’en exposer ici quelques bribes…

Et d’en ébaucher une première maquette provisoire ici même.

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