22 mars 2010
[Portraits crachés — Suite sans fin.]

Faute d’autonomie financière, Julia, bientôt 24 ans, habitait encore récemment le centre de Paris, chez papa-maman. Même à court terme, ça lui pourrissait la tête en journée et tout le reste en insomnies. Mais son nouveau job d’infographiste, un contrat à durée très limité, renouvelable sous condition imprévisible à l’heure qu’il est, lui permet enfin d’envisager ric-rac soit une chambrette en soupente soit un studio en colocation, pas trop loin de chez ses pieds-noirs de parents, juste la porte à côté, disons à quelques pâtés de maison, une minute à vol d’oiseau, ou le triple à pieds grand maximum, mais l’idée qu’elle aille se déloger on ne sait où, dans un autre arrondissement, à quatre stations de métro de là, sinon pire encore, extra muros, dans une banlieue limitrophe, ce serait pas imaginable tu te rends compte de nous faire ça, trop d’émancipation à la fois.
Alors, plus caricaturale que nature, sa mère juive lui a proposé de coucher sur le papier un code de bonne conduite : deux dîners par semaine à la maison, en plus du déjeuner dominical avec tous les cousins au sens large. Moi, Julia R***, fille de Monique et Lazare R***, m’engage à… Signé par l’expatriée imminente, contresigné par l’autre partie en présence, avant de vider les assiettes du repas de famille pour fêter ça, le prochain et les suivants, en tout quelques tonne de gravats combleront à la longue le fossé des générations.

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