@ffinités

4  janvier 2012
[Texticules et icôneries — Mannequinat précaire.]

L’idéal masculin, kit démontable.

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3 janvier 2012
[Rumœurs à la chaîne
& légendes urbaines
L’Apocalypse, et après?
(suite sans fin)]

Les Mayas, avant qu’on vienne fouiller dans leurs ruines, ils avaient même pas été foutus d’inventer la roue, ni pelle ni pioche, pas même une lame de couteau, aucun truc métallique, ni la charrue après les bœufs ni le moindre cheval de trait, tout à dos d’hommes entêtés comme des mules à construire des escaliers géants partout, juste pour s’approcher du septième ciel, en suppliant le soleil de réapparaître après le solstice d’hiver, et une autre prière pareil en été, du coup à cause de leur fixette astrologique, ils avaient pas pensé non plus à battre monnaie, pas un centime en circulation, aucun échange d’argent, à part le troc de cacao, sans avoir grand chose à se mettre sous la dent, ni blé ni patate ni nouille, que du maïs à chaque repas, et faute de viande rouge, du chien grillé les jours de fête, ou alors, pour se couper l’appétit, en cas de disette, il leur restait les feuilles de coca, à mastiquer en fermant sa gueule, bref que des nuls et du chiqué, alors moi je dis que les Mayas, ils ont surtout inventé l’esclavage de leur propre peuple, avec droit de cuissage polygame pour les emplumés de la haute, et que cette civilisation mort-née, elle a jamais rien prévu de ce qui risquait d’arriver, d’ailleurs quand les conquistadors ont débarqué sur place, ces zombies-là avaient disparu depuis longtemps, cinq siècles au bas mot, pas comme les Incas ou les Aztèques qui jouaient les prolongations, même si y’en avait plus pour longtemps, mais bon ça n’empêche que je voudrais bien qu’on m’explique comment les Mayas, eux, ils auraient pu faire, avec leur pauvre calendrier solaire et cinq cents hiéroglyphes piqués aux Égyptiens, pour deviner la date exacte de la fin du monde – tout bientôt, le 21 décembre 2012 à ce qu’on dit –, et puis quoi encore, faudrait pas que ces zéros pointés, ils croient nous donner des leçons posthumes, vu que pour une fois, on y est pour rien dans leur terre brûlée, pas notre faute si ça fait un bon millénaire qu’ils se sont éclipsés tout seul, rayés de la carte, suicidé d’avance.

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2 janvier 2012
[Texticules et icôneries — Haut, bas, fragile.]

Passer inaperçu malgré tout.

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1er janvier 2012
[Good resolutions —
Nouvelle année, en aparté.]

Entrer sans frapper
Commencer par le milieu
Changer d’avis de décès
S’en tamponner le coquillard
Envoyer paître ses fantômes
Croquer la pomme ad libidum
Se confondre sans excuse
Inverser son centre de gravité
Apprendre la grammaire italienne
S’oublier pour boire & vice pas versa
Ne s’exclure d’aucun contexte
Libérer ses garde-fous
Perdre connaissance
N’être & persévérer
S’exposer à sa propre disparition
Pendre tes jambes à mon cou
Semer le bon grain & l’ivraie
Ouvrir certaines hostilités
Cesser de fumer à huis clos
Ne pas se vendre séparément
Conspirer pour respirer ensemble
Prendre ses doutes à revers
Habiter hors l’image de ses propres cloisonnements
Ne rien payer pour attendre
Rester amateur en tout
Se réfléchir à plusieurs
Relire l’Ancien Testament en diagonale
Racheter un appareil photo
Ne plus faire semblant de simuler l’imposture
S’armer d’impatientes lectures
Rentrer dans le détail
Arrêter les mauvais jeux de mots
S’égarer dans l’envers du décor
Conjurer la tristesse de l’automne
Sortir de son trou par n’importe quel bout
Demander la lune & prendre la thune
Repousser les murs au-delà du réel
Baisser ma dose de caféine
Se démarquer de ses propres buts
Sauter une ligne & changer d’origine
Marcher ou pas
Ne pas tomber sous le sens
Aller voir ailleurs qui je suis
Se méfier des verbes à l’infinitif

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31 décembre 2011
[Compte à rebours — Ni demain ni la veille.]

En cas d’absence, fête comme si de rien n’était.

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25 décembre 2011
[Texticules et icôneries —
Vices de forme & fautes de frappe.]

À chaque lettre volée, sa liberté gagnée.

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19 décembre 2011

[Antidote au pessimisme ambiant
Attention aux variations saisonnières.]

Depuis le soulèvement tunisien de Sidi Bouzid, fin décembre 2010, des répliques sismiques n’en finissent pas d’agiter la planète et d’essaimer ici et là un élan de révolte sans frontière : agoras de campeurs en Espagne, grèves sauvages en Chine, manifestations monstres de la «génération fauchée» au Portugal, mouvement étudiant anticuts en Angleterre, résistance de masse à l’austérité punitive en Grèce, insurrection populaire en Égypte, occupation tous azimuts des places fortes financières aux États-Unis, protestation anti-corruption en Russie. Il suffit que la peur change de camp pour que ça fasse tache d’huile. Bien sûr, les autorités en place agitent toujours les mêmes chiffons rouges : nous ou le chaos monétaire, nous ou le péril islamiste, nous ou la guerre ethnique fratricide. Et à force d’élections retardées, anticipées ou truquées, ils parviennent tant bien que mal à sauver les meubles, sacrifiant parfois au passage tel despote honni pour mieux recycler la légitimité d’un pouvoir fort.
À suivre heure par heure, les flux et reflux de cette effervescence multipolaire, on serait tenté de céder trop vite à un enthousiasme naïf ou à une déception blasée, et on en oublierait presque que cette mondialisation de la contestation sociale n’en est qu’à ses prémisses, d’autant qu’elle doit réinventer à la base ses formes d’auto-organisation, sans messianisme révolutionnaire, ni bureaucratie verticale, ni modèle idéologique unifié. Alors hâtons-nous de n’en rien conclure. Sans bilan globalement positif non plus, mais avec des lueurs d’espoir toujours précaires. Des lucioles à l’horizon, plutôt que des aurores boréales.
Même si, dans l’œil du cyclone franco-français, le mélodrame pré-électoral nous a plongé toute l’année durant dans une sorte de coma collectif, entre inertie attentiste et profil bas résigné, il n’est pas interdit d’en prendre de la graine, pour semer le trouble un jour prochain. En s’inspirant par exemple de ces trois bonnes résolutions en image qui nous viennent des foyers d’agitation qui ont secoué récemment la côte californienne.

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15 décembre 2011
[Rumœurs à la chaîne
& légendes urbaines
(suite sans fin).]

Pour le naufrage du Titanic, faut pas s’étonner si, parmi les victimes, mille cinq cent treize au dernier bilan, d’après les manuels scolaires, on parle jamais de la princesse Amen-Ra, parce qu’elle était déjà morte depuis un sacré bail, 1513 avant Jésus Christ justement, et comme personne l’avait déclarée à l’embarquement, juste sa momie planquée dans une malle par un Anglais de première classe, un trafiquant du British muséum je crois, même si c’était presque légal à l’époque de violer les sépultures antiques, juste pour l’histoire de l’art colonial, n’empêche, avec ce genre de passagère clandestine à bord, ça pouvait que porter la poisse à des gens innocents.

Le pseudo «syndrome de Stockholm», ça vient d’un fait divers tout con, fin août 1973, un évadé de fraîche date, Jan Erik Olsson il s’appelle, qui braque une agence du Crédit suédois, manque de bol, une patrouille de flics passait par là, du coup il se barricade à l’intérieur, avec trois employées et leur con de directeur, ensuite il demande qu’on libère Clark Olofsson, son ex-compagnon de cellule, marché conclu, et maintenant il sont six à passer la nuit dans la salle des coffres, quatre captifs en sursis et leur inséparables gardiens, Olsson & Olofsson, mais le lendemain matin, ces cons de flics menacent de donner l’assaut, alors ça crée des liens entre les assiégés, surtout que les otages, si jamais ça tire dans tous les coins, ils risquent une balle perdue chacun, alors la guichetière Kristin, elle propose de se sacrifier, que si on leur file une bagnole, elle servira de monnaie d’échange sur la banquette arrière, mais ça les autorités refusent et, après 48 heures de négociations, happy end et retour à la case départ pour les deux taulards, sauf qu’au moment du procès, inversion des rôles, plus personne pour témoigner à charge, les victimes envoient des lettres de soutien aux preneurs d’otage, en plus du fric qu’elles ont collecté pour payer l’avocat de la défense, et pire que ça, deux ans plus tard, paraît que la petite Kristin, la plus traumatisée des quatre, aurait épousé Olsson ou Olofsson, je sais plus trop lequel, mais entre les deux paraît que son cœur a longtemps balancé, et ce mariage tardif, comme c’était pas banal, les psychiatres ils lui ont donné un nom de maladie rare, «syndrome de Stockholm», en expliquant des trucs insensés sur la «psychose de survie» ou le «backslash empathique», alors que pas un seul de ces experts à la con ne s’est jamais demandé si la miss Kristin en question, elle n’était pas de mèche depuis le début, une sorte de troisième larron, sinon l’éminence grise de la bande, parce qu’avec une complice aussi bien placée, les hold-up ça marche à tous les coups, enfin presque.

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12 décembre 2011
[Texticules et icôneries — Effaceur d’encres murales.]

Je suis l’arbre qui cache la forêt.

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10 décembre 2011
[Souviens-moi — (suite sans fin).]

De ne pas oublier que, sortant de ce rêve où je parlais couramment italien et très mal le français, il m’a fallu plusieurs minutes d’un dialogue de sourds avec ma compagne pour m’apercevoir qu’en réalité c’est plutôt le contraire.

De ne pas oublier qu’au lendemain de sa mort, ma mère, ancienne agent dite « contractuelle » au CNRS, n’avait pas fini de payer le rachat de sa retraite de fonctionnaire et qu’il lui restait encore six mensualités pour avoir droit au taux plein.

De ne pas oublier que lors d’une adaptation théâtrale du Livre de l’Ecclésiaste, alors qu’un imperceptible décrescendo des projecteurs plongeait le comédien dans le trou noir de ses derniers mots – « tout n’est que buées et poussières de vent » –, j’ai dû être le premier à frapper dans mes mains, sitôt apostrophé par mon voisin – « Chut! » –, qui n’était autre que Claude Régy, le metteur en scène, soucieux que le public quitte la salle en silence, sans applaudissement final, ni bravo, ni aucune de ces vaines manifestations de contentement.

De ne pas oublier que lorsqu’une balle de ping-pong est légèrement enfoncée, il suffit de la plonger dans une casserole d’eau bouillante pour qu’elle retrouve sa rotondité initiale.

De ne pas oublier que le plus fauché d’entre nous, Jean-philippe, étudiant aux Beaux-arts, ayant refusé de payer l’addition sous prétexte qu’une sale petit bestiole gisait au fin fond de sa soupe thaïlandaise, n’en était pas à son coup d’essai, et qu’à la troisième blatte, mouche ou punaise échouant au creux de son assiette en moins d’un trimestre, on eut beau le charrier, vanner, mettre en boîte, il n’a jamais voulu avouer qu’il les collectionnait exprès, ses insectes nuisibles, pour bouffer à l’œil au resto.

De ne pas oublier qu’aux États-Unis 8% des personnes interrogées croient qu’Elvis Presley n’est pas décédé en août 77, soit vingt-quatre millions de fans persuadés que le King a fait le mort pour de faux et ressuscité ailleurs dans l’anonymat, et que, toujours aux USA, on compte exactement le même nombre d’athées, convaincus que Jésus, comme son père, n’ont jamais été que deux imposteurs parmi tant d’autres.

De ne pas oublier que, la semaine dernière, avachi devant l’écran, j’ai mis une demi-heure à m’apercevoir que ce DVD, j’en reconnaissais les scènes à mesure et qu’il m’avait d’ailleurs fait le même effet, de déjà vu, il y a des années de cela, mais comme de bien entendu, à force de rechercher la date de sa première sortie au cinéma, le titre du film vient à nouveau de m’échapper.

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