4 octobre 2012
[Texticules & icôneries
Détournement de détournement,
du Tag-au-Tag (première série)]

À l’état brut, le tag, ça inscrit dans le décor urbain un signe de connivence, une marque déposée subjective, sans but lucratif mais à fort capital symbolique, juste le blaze d’un inconnu qui balise clandestinement un territoire. La plupart du temps, ça passe par l’emprunt d’un verbe, d’un substantif ou d’un adjectif plutôt ordinaires qui, délestés de leur signification initiale, deviennent purs logos d’une main invisible, acronymes pirates d’une société secrète, icônes dupliqués à l’infini d’une singularité fantoche.
Depuis quelques années, j’en ai photographié pas mal de ces spécimens d’encres murales, en région parisienne. Des mots d’ordre esseulés hors contexte, dont j’ai zoomé en gros plan les lettrages. Certains verront dans ce vrac de tags la preuve d’une réification barbaresque du langage réduit à sa plus simpliste expression. D’autres y verront à l’œuvre une réappropriation sauvage du vocabulaire selon un jeu calligraphique sophistiqué. Régression vers l’insignifiance ou revalorisation du signifiant ? Ça se discute, mais peu importe. À rebours de ces jugements de valeur, j’ai longtemps eu envie de recycler ces inscriptions éphémères, de rendre leurs patronymes impropres au sens commun, d’en rassembler les bribes éparses pour écrire un semblant de quelque chose en image.
Et pour commencer, ci-dessous, trois premières phrases, de six tags chacune. Sans souci de syntaxe ni d’orthographe, puisque que ces cadavres exquis articulent aveuglément les fragments d’un inconscient collectif.

[… combien orgie pixel pour époque parano ]

[ l’impossible scoop ça-comme provoque ruine presto ]

[… rêveur déchaîné il peut peanuts contre icône …]

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