17 mai 2011
[Allergie à l’air du temps —
DSK: assez de pitié… c’est déplacé.]

Depuis 24 heures, les têtes molles de gauche & de droite rivalisent de compréhesion pour l’ancien directeur du FMI, sous prétexte qu’il serait présumé innocent, laissant à Marine Le Pen et Bernard Debré l’exclusivité d’un contre-feu à cet élan compassionnel pour un Puissant saisi au moment de sa déchéance. À l’exception de Cécile Duflot et Clémentine Autain, pas une réaction nuancée, chez les socialo-écolos, qui devraient pourtant s’inspirer du plus élémentaire bon sens: si tentative de viol il y a eu, notre première pensée va à l’abusée… même si l’accusation paraît à certains peu plausible, incohérente, invraisemblable. Bref, ça pue, ce parti pris qui voudrait salir le témoignage de l’une pour laver l’autre de tout soupçon. On connaît trop bien ce refrain-là: post coitus forcé l’animâle a le complot triste. Autrement dit, «C’est pas queue de ma faute, c’est rien qu’elle qui m’a provoqué…!?» Au milieu des années 70, sur une couverture de Charlie Hebdo, Reiser avait génialement caricaturé l’arrière-pensée ordinaire des procès pour viol: le président du tribunal grondait ainsi la chèvre qui avait porté plainte: «N’empêche, mademoiselle, vous n’aviez pas de culotte!». Lieux communs d’une société phallocratique qui n’a pas tellement changée, et dont on retrouve trace dans cette émotion médiatique sélective cherchant à tout prix à sauver la réputation de DSK. D’où ce sophisme répété à l’envi, de la bande FM aux éditoriaux de presse, ce présupposé aussi machiste que débilitant: la plaignante est a priori bluffeuse; et l’inculpé victime d’un malentendu.
Alors, comme dans un rêve éveillé, je me prends à halluciner la retransmission TV, ce soir, en direct du Festival de Cannes, à l’heure de la montée des marches, pour la projection de L’Apollonide, souvenirs de la maison close, le film de Bertrand Bonello. Et si les douze «putains» du bordel en question, oui, ces douze intermittentes du pestacle retrouvant le goût épicé du dissensus, brandissaient ensemble une large banderole avec juste marqué dessus:
NOUS SOMMES TOUTES DES FEMMES DE CHAMBRE!!!
Et si, en levant des poings gantés de dentelle noire, les mêmes reprenaient en chœur quelques slogans bien sentis, du genre:
«Chaud, chaud, chaud, ras l’viol des lapins chauds!», «DSK, prends pas ton cas, pour une généralité!», «Quand une femme dit non, c’est pas oui, c’est non!», «Homme infâme du FMI, paie ta dette, par ici la sortie!»
Un happening sans doute inimaginable aujourd’hui, et c’est bien la preuve que certains réflexes se sont perdus, du côté d’une gauche au sens large… large mais pas forcément si lâche.

À moins que…

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